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    Océans plastifiés : ces scientifiques prônent de ne pas nettoyer !

    Je revois encore cette image prise lors d’une plongée en Méditerranée : un banc de poissons strié de particules blanches, flottant parmi des microbilles de plastique. Ce spectacle familier soulève une question troublante : faut-il réellement enlever ces déchets, au risque de briser un nouvel équilibre écologique ?

    Comment le plastique pollue l’océan ?

    Le plastique, qui peut mettre plusieurs siècles à se dégrader, s’accumule chaque année à hauteur de millions de tonnes dans nos mers. Loin de disparaître, il se fragmente en microplastiques – des particules invisibles à l’œil nu (moins de 5 mm) – ingérées par les poissons, les coquillages et même le plancton. Ces particules se retrouvent ensuite dans la chaîne alimentaire, allant jusqu’à nos assiettes (PNUE).

    Lors d’une randonnée en kayak sur la côte bretonne, un ami a recueilli des œufs de grenouille recouverts de fines pellicules plastiques, signe tangible de la négligence de nos systèmes de collecte et de recyclage. À chaque marée, les sacs, bouteilles et fragments se déposent sur le rivage, offrant un habitat de fortune à des organismes insoupçonnés.

    oceans plastifies

    Pourquoi certains scientifiques pensent qu’il ne faut pas retirer le plastique des océans ?

    Contre toute attente, certains chercheurs plaident pour ne pas nettoyer le « 7e continent » de déchets flottants. Ils pointent le rôle du neuston – ces algues, mollusques et méduses qui vivent à l’interface eau-air – qui se sont adaptés à ces amas plastiques. L’écologue Rebecca Helm (Scripps Institution of Oceanography) met en garde :

    « Extraire ces particules pourrait décimer un écosystème que nous ne maîtrisons pas suffisamment. »

    Parmi ces résidents de fortune, le dragon de mer Glaucus ou l’escargot Janthina utilisent les débris pour se nourrir, s’abriter ou se déplacer. Dans une étude publiée par l’Agence française pour la biodiversité, on rapporte qu’en Atlantique Nord, ces gastéropodes profitent des courants porteurs générés par les déchets plastiques pour parcourir des centaines de kilomètres sans effort.

    J’ai moi-même observé, l’été dernier, une colonie d’algues flottantes cohabitant avec des bris de filets de pêche : sans ces fibres synthétiques, ces organismes – essentiels à la reproduction de certaines espèces de poissons – auraient perdu leur plateforme de reproduction. Pourtant, la majorité des programmes de nettoyage menés par des ONG comme The Ocean Cleanup visent à éliminer la totalité de ces agrégats, ignorant leur valeur écologique potentielle.

    oceans plastifies

    En outre, la disparition du neuston impacterait directement les tortues marines et certains oiseaux pélagiques, qui s’en nourrissent (IUCN). Les biologistes redoutent une rupture trophique : en retirant les déchets, on supplante involontairement la base même de certains réseaux alimentaires.

    Ce dilemme pose un choix cornélien : préserver un écosystème fragile bâti sur notre pollution ou continuer à laisser le plastique menacer la santé des océans et de l’humanité ? Les prochaines années devront concilier préservation et gestion raisonnée des déchets marins, en intégrant la science et la réalité de la vie sous-marine.

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    Marc Dubois
    Marc Dubois
    Avec un parcours solide en ingénierie informatique, Marc Dubois est un rédacteur technique expert. Il excelle dans la vulgarisation de concepts complexes et dans l’analyse des tendances technologiques, rendant les sujets IT compréhensibles et intéressants pour les lecteurs de tous niveaux.

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